Crise de la dette, crise financière, récession… Tous ces termes ont été utilisés pour évoquer la situation économique et financière à la suite de la censure du gouvernement Barnier, le 4 décembre 2024. Faut-il s’attendre au pire dans les prochaines semaines ?
Sommes-nous à l’aune d’une crise financière ?
Non, c’est très clair. Certes, nous empruntons plus cher que l’Allemagne, l’Espagne ou la Grèce, mais à des taux encore historiquement faibles. Sur la dette de référence à dix ans, nous empruntons en-dessous de 3%. C’est très raisonnable. Comment expliquer cela ? Le contexte global est favorable : période de désinflation généralisée et baisse des taux partout en Europe. S’ajoutent à cela les spécificités propres au marché de la dette française.
C’est une dette très liquide, ce qui signifie qu’il y aura toujours des vendeurs et des acheteurs pour s’assurer un fonctionnement normal du marché. Elle offre un rendement attrayant (proche de 3% sur dix ans). Enfin, c’est une dette de bonne qualité puisqu’elle est bien notée par les agences de notation. Cette situation n’est pas près de changer… Heureusement pour nous ! Par conséquent, si vous possédez en bas de portefeuille des obligations souveraines françaises, ce n’est pas le moment de les vendre.
Plus compliqué pour les actions
Pour les actions françaises, c’est une autre affaire. Jusqu’au 7 juin dernier, l’indice principal CAC 40 était en tête des meilleures performances boursières européennes. La dissolution a tout changé. On observe une corrélation positive entre le coût d’emprunt de la France, qui a augmenté par rapport à celui des autres grands pays européens, et le CAC 40. C’est ce qui explique en grande partie la mauvaise performance de l’indice.
C’est même très mauvais si on compare aux autres indices européens. Hors dividendes réinvestis, afin de pouvoir faire des comparaisons pertinentes, le CAC 40 est le seul grand indice européen en baisse depuis janvier. À l’inverse, l’indice espagnol Ibex 35 affiche une hausse de 18%, tandis que le Dax allemand a atteint début décembre un point haut historique.
C’est encore pire pour le compartiment des petites et des moyennes valeurs, les small et mid caps. Le CAC Small a perdu plus de 20% depuis le 7 juin. On est donc en bear market. Il perd plus de 12% depuis le début de l’année. La sous-performance par rapport aux petites valeurs européennes est de 20%… et de 35% par rapport aux petites valeurs américaines.
Les valorisations sont certes attrayantes. Mais cela ne veut rien dire, puisqu’il n’y a pas d’acheteurs en face. Les volumes échangés sont atones. Les gérants ont déserté ce compartiment de marché. Il ne reste que quelques particuliers disposés à prendre de gros risques – la volatilité est élevée et les chutes du cours des actions, souvent de plus de 50% depuis le début de l’année.
Le décalage de performance boursière entre la France et le reste du monde pourrait durer à la faveur de la crise politique dans laquelle est plongé le pays et de l’incapacité de la Chine à relancer massivement son économie (ce qui est négatif pour les valeurs du luxe, qui sont surreprésentées au sein du CAC 40). Le risque est élevé d’assister à une décollecte d’épargne sur les actifs français au profit de produits exposés sur les indices et les titres étrangers, en particulier américains. C’est déjà en train de se produire. Mais cela risque de prendre de l’ampleur dans les mois à venir. Les épargnants sont rationnels : pour trouver du rendement, il faut détenir des actions américaines en portefeuille et certainement réduire, au moins à court terme, son exposition aux actifs boursiers français.
Une crise peut en cacher une autre
Il n’y a pas de risque crédible de crise financière. C’est la bonne nouvelle ! En revanche, il y a bien une crise. Celle-ci est économique et elle va s’accélérer, compte tenu de la pagaille politique. C’est à peine caricatural : la France est à l’arrêt. Les consommateurs ne consomment plus. Le taux d’épargne est à un niveau record, à plus de 18%. Et il n’est pas près de baisser. Les entreprises n’investissent plus. Pour 80% d’entre elles, elles peuvent financer leurs investissements sans recours à l’emprunt. Mais elles n’ont pas envie de le faire, car elles ne savent pas ce qui les attend en termes de fiscalité dans les mois à venir. Quant aux investisseurs étrangers, ils vont se détourner de la France. On ne peut pas les blâmer. C’est un triste spectacle qui nous est offert en ce moment.
L’année 2025 pourrait être une année blanche en termes de croissance, avec une activité économique molle qui flirte avec la récession, un retour plus rapide du taux de chômage vers 8% et quasiment pas de richesses nouvelles créées. C’est un sacré problème quand notre modèle social repose sur une très forte dose de redistribution…
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